5510 Évaluation des éléments probants pour cerner les risques de fraude jusqu’alors non identifiés
juin-2020

Aperçu

La présente section traite des questions suivantes :

  • la façon dont on évalue les éléments probants pour cerner les risques de fraude jusqu’alors non identifiés;
  • ce qu’il faut examiner lorsqu’une anomalie est détectée;
  • les procédures à exécuter lorsqu’il est impossible de poursuivre la mission;
  • Quels types d’affirmations de la direction sont requises.
Évaluation des éléments probants

Exigences des NCA

L’auditeur doit évaluer si les procédures analytiques qu’il met en œuvre vers la fin de son audit, pour parvenir à une conclusion générale quant à la cohérence des états financiers avec sa compréhension de l’entité, indiquent l’existence d’un risque jusqu’alors non identifié d’anomalies significatives résultant de fraudes. (NCA 240.35)

Directives des NCA

La NCA 330 exige que, sur la base des procédures d’audit mises en œuvre et des éléments probants recueillis, l’auditeur apprécie si ses évaluations initiales des risques d’anomalies significatives au niveau des assertions demeurent valables. Cette appréciation est avant tout qualitative et fondée sur le jugement de l’auditeur. Elle peut apporter un éclairage complémentaire sur les risques d’anomalies significatives résultant de fraudes et sur l’éventuelle nécessité de mettre en œuvre des procédures d’audit supplémentaires ou différentes. L’Annexe 3 présente des exemples de circonstances pouvant indiquer la possibilité de fraudes. (NCA 240.A50)

Déterminer quelles tendances et corrélations particulières sont susceptibles d’indiquer un risque d’anomalies significatives résultant de fraudes exige l’exercice du jugement professionnel. Les corrélations inhabituelles concernant les produits et le résultat en fin d’exercice sont particulièrement pertinentes. Il peut s’agir, par exemple, de montants de produits anormalement élevés comptabilisés dans les dernières semaines de la période ou d’opérations inhabituelles, ou encore d’un résultat qui est incompatible avec l’évolution des flux de trésorerie d’exploitation. (NCA 240.A51)

Directives du BVG

Voir la section BVG Audit 5511 pour obtenir des exemples de situations qui indiquent la possibilité de fraudes.

Évaluer les résultats des tests d’audit

L’évaluation des risques d’anomalies significatives résultant de fraudes se fait tout au long de l’audit. Les travaux sur place peuvent révéler des conditions susceptibles de changer ou d’appuyer les jugements de l’auditeur quant à l’évaluation des risques : déficiences dans la comptabilité, éléments de preuve contradictoires ou manquants, relations problématiques ou inhabituelles entre l’équipe de la mission et l’entité.

Il faut se demander si les réponses obtenues aux demandes d’informations au sujet des relations analytiques étaient incohérentes ou vagues en comparaison des autres éléments probants. Le responsable de la mission vérifie si les membres de l’équipe de mission ont communiqué de manière appropriée tout au long de l’audit.

À la fin de l’audit, évaluer si les résultats obtenus par les procédures d’audit et des observations ont une incidence sur l’évaluation du risque de fraude déjà effectuée et s’il faut mettre en œuvre des procédures d’audit additionnelles ou différentes. Cette évaluation est de nature qualitative fondée sur le jugement. De plus, actualiser les procédures analytiques des produits dans les procédures analytiques de l’évaluation du risque. Si des études comparatives ont été effectuées, envisager de les mettre à jour selon les renseignements les plus récents.

On ne peut présumer qu’une déficience détectée est un fait isolé. Il faut se demander si cette déficience indique que le risque d’anomalies significatives résultant d’une fraude est plus élevé à un endroit en particulier. Il faut examiner les répercussions en rapport avec d’autres aspects de l’audit, notamment la fiabilité des déclarations de la direction.

Voir les sections BVG Audit 5033 et BVG Audit 5010 pour obtenir des directives sur l’évaluation des risques.

Prise en compte des anomalies détectées

Exigences des NCA

Si l’auditeur relève une anomalie, il doit évaluer si cette anomalie constitue un indice de fraude. Si c’est le cas, il doit en apprécier les incidences possibles sur les autres aspects de l’audit, notamment la fiabilité des déclarations de la direction, en étant conscient qu’un acte de fraude constitue rarement un cas isolé. (NCA 240.36)

Si l’auditeur relève une anomalie, qu’elle soit significative ou non, et qu’il a des raisons de croire qu’elle résulte ou pourrait résulter d’une fraude impliquant la direction (en particulier, la haute direction), il doit reconsidérer son évaluation des risques d’anomalies significatives résultant de fraudes et son incidence sur la nature, le calendrier et l’étendue des procédures d’audit à mettre en œuvre pour répondre à ces risques. Lorsqu’il reconsidère la fiabilité des éléments probants déjà recueillis, l’auditeur doit également se demander si des circonstances ou des situations indiquent une collusion possible impliquant des employés, la direction ou des tiers. (NCA 240.37)

Si l’auditeur obtient confirmation de l’existence d’anomalies significatives résultant de fraudes dans les états financiers ou qu’il se trouve dans l’impossibilité de conclure sur ce point, il doit en évaluer les incidences sur l’audit. (NCA 240.38)

Politique du BVG

Si les travaux indiquent qu’une fraude a, ou aurait, été perpétrée, la question doit être signalée au responsable de la mission sans délai. Ce dernier doit alors consulter les vérificateurs généraux adjoints de la pratique applicable, le spécialiste interne d de la fraude, et les Services juridiques conformément aux dispositions de la section BVG Audit 3081. [juin-2020]

S’il y a lieu de croire que l’entité devrait consulter son conseiller juridique ou tout autre spécialiste au sujet de l’obligation de divulgation ou de toutes autres répercussions, et qu’elle n’a pas l’intention de le faire, il faut consulter le spécialiste interne de la fraude ou les Services juridiques pour savoir s’il faut inclure dans les états financiers de l’information au sujet de passifs éventuels ou mentionner cette information dans le rapport de l’auditeur. [juin-2020]

Si l’intégrité et l’honnêteté de la direction ou des responsables de la gouvernance sont mises en doute, il faut consulter les vérificateurs généraux adjoints de la pratique applicable et le spécialiste interne de la fraude conformément aux dispositions de la section BVG Audit 3081 pour décider de la démarche à entreprendre. [juin-2020]

Directives des NCA

Puisque la fraude suppose l’existence de motifs ou de pressions incitant à la commettre, des circonstances perçues comme favorables à sa perpétration ainsi qu’une certaine rationalisation de l’acte, il est peu probable qu’une fraude détectée constitue un cas isolé. Par conséquent, des anomalies nombreuses relevées dans un même établissement, même si leur effet cumulatif n’est pas significatif, peuvent indiquer l’existence d’un risque d’anomalies significatives résultant de fraudes. (NCA 240.A52)

Les incidences d’une fraude détectée varient selon les circonstances. Ainsi, une fraude négligeable en elle-même peut être importante si elle implique la haute direction. La fiabilité des éléments probants recueillis précédemment peut être remise en question, dès lors qu’il peut y avoir un doute sur l’exhaustivité et la sincérité des déclarations de la direction ainsi que sur l’authenticité et la fiabilité des documents comptables et des pièces justificatives. Il peut également y avoir une possibilité de collusion impliquant des employés, des dirigeants ou des tiers. (NCA 240.A53)

La NCA 450 et la NCA 700 définissent des exigences et fournissent des indications sur l’évaluation et le traitement des anomalies, ainsi que leur incidence sur l’opinion exprimée par l’auditeur dans son rapport. (NCA 240.A54)

Directives du BVG

Voir la section BVG Audit 5513 pour obtenir plus de directives sur le recours au spécialiste interne d de la fraude.

Des éléments probants de fraude ou d’autres motifs donnant à penser qu’une fraude est avérée ou suspectée peuvent surgir en tout temps et de différentes manières :

  • interrogations soulevées par un membre de l’équipe de la mission;

  • interrogations ouvertement soulevées par un gestionnaire ou un employé de l’entité;

  • une dénonciation anonyme d’une personne de l’intérieur ou de l’extérieur de l’entité;

  • avis donné aux auditeurs et au comité d’audit au sujet d’une fraude, significative ou non, détectée par la direction, qui implique des directeurs ou des employés qui jouent un rôle déterminant dans l’application des contrôles de l’entité;

  • signes ressortant de un ou de plusieurs éléments probants examinés au cours de l’audit;

  • défaut de répondre rapidement aux préoccupations de l’auditeur au sujet de la divulgation de questions touchant le contrôle;

  • circonstances extérieures ou médiatisation d’événements, mesures d’application de la loi ou des organismes de réglementation, etc.

Si les résultats des travaux indiquent une fraude avérée ou suspectée, le responsable de la mission pourra faire intervenir le spécialiste interne de la fraude dans la décision relative à la démarche à entreprendre, par exemple :

  • la stratégie pour établir les faits et l’étendue de la fraude et ses répercussions sur les états financiers;
  • la communication du problème au client et des recommandations sur la façon de l’aborder;
  • les questions légales et réglementaires plus générales;
  • les options de réparation (correction) et de recouvrement d’actifs.

Le responsable de la mission, avec l’aide du spécialiste interne de la fraude, vérifie que des travaux additionnels suffisants sont exécutés soit pour vérifier l’incidence de la fraude sur les états financiers soit pour obtenir un niveau d’assurance raisonnable que l’incidence n’est pas significative.

L’ampleur réelle ou possible, la nature, l’étendue de la dissimulation et la gestion des personnes en cause (gestionnaires et employés) sont autant de facteurs à considérer au moment de décider des mesures à prendre.

Si l’entité accepte que les travaux de l’auditeur soient étendus pour qu’il fasse enquête sur une fraude avérée ou suspectée (plutôt que de la faire elle-même ou de la confier à un autre cabinet), cette enquête est exécutée par des experts en la matière, ou menée par eux, et convenue avec le comité d’audit. Cette enquête pourrait comprendre les activités suivantes :

  • obtenir des éléments de preuve et recueillir des renseignements, y compris l’utilisation de techniques informatiques, le cas échéant;

  • interroger le personnel compétent de l’entité et, peut-être, des tiers;

  • documenter et analyser les données à l’aide de diverses techniques;

  • collecter et contrôler les preuves;

  • conseiller sur la ligne de conduite à suivre;

  • rendre compte des constatations dans la forme qui convient le mieux au vu des faits et des destinataires du rapport (direction, régulateurs, police, etc.);

  • garder le contact avec les conseillers juridiques de l’entité;

  • garder le contact avec les régulateurs ou les autorités chargées de faire appliquer la loi;

  • le cas échéant, le spécialiste interne de la fraude pourra aider à identifier et à mettre en œuvre des mesures de correction à la fois pour recouvrer les actifs détournés et pour atténuer le risque que l’incident se répète.

À moins que les circonstances ne dictent le contraire, l’enquête sur une fraude est effectuée en vertu d’un mandat distinct, de manière à ce que cette mission se distingue nettement d’un audit de par son étendue et ses objectifs et que la limite de responsabilité soit clairement établie.

Dans les cas où il est impossible d’obtenir de l’information adéquate sur un acte de fraude soupçonné, il faut examiner l’incidence du manque d’éléments probants sur le rapport d’audit. Si l’auditeur conclut que l’effet de l’acte de fraude soupçonné sur les états financiers pourrait être significatif, il faudra envisager d’exprimer une opinion avec réserve ou une opinion défavorable. Si l’entité empêche l’auditeur d’obtenir les éléments probants appropriés pour évaluer si la fraude est significative au regard des états financiers, il pourrait être approprié d’exprimer une opinion avec réserve fondée sur la limitation de l’étendue, ou de se récuser.

Il faut également se demander si les circonstances de l’acte frauduleux empêchent l’auditeur de se fier aux déclarations de la direction et laissent entendre qu’il faudrait rompre la relation avec l’entité. En prenant les décisions sur ces questions, il importe d’évaluer avec soin si la haute direction (y compris le conseil d’administration ou le comité d’audit) accorde l’attention voulue aux faits qui lui ont été signalés.

Impossibilité de poursuivre la mission

Exigences des NCA

Si, en raison de l’existence d’une anomalie résultant d’une fraude avérée ou suspectée, l’auditeur se trouve dans des circonstances exceptionnelles qui le conduisent à remettre en cause la possibilité de poursuivre sa mission, il doit : (NCA 240.39)

a) déterminer quelles sont ses obligations professionnelles et légales dans les circonstances, et notamment s’il est tenu de faire rapport à la personne ou aux personnes qui lui ont confié la mission d’audit ou, dans certains cas, aux autorités de réglementation;

b) se demander s’il est approprié de démissionner, lorsqu’il est possible de le faire selon les textes légaux ou réglementaires applicables;

c) en cas de démission :

i) s’entretenir de sa démission et de ses motifs avec la direction, au niveau hiérarchique approprié, et avec les responsables de la gouvernance,

ii) déterminer s’il est tenu professionnellement ou légalement de faire part de sa démission et de ses motifs à la personne ou aux personnes qui lui ont confié la mission ou, dans certains cas, aux autorités de réglementation.

Directives des NCA

Impossibilité de poursuivre la mission

Voici des exemples de circonstances exceptionnelles qui peuvent se présenter et conduire l’auditeur à s’interroger sur la possibilité de poursuivre sa mission : (NCA 240.A55)

  1. l’entité ne prend pas les mesures appropriées que l’auditeur juge nécessaires relativement à la fraude, même dans le cas où la fraude n’est pas significative par rapport aux états financiers;

  2. l’évaluation par l’auditeur des risques d’anomalies significatives résultant de fraudes et les résultats des procédures d’audit indiquent l’existence d’un risque important de fraudes significatives et généralisées;

  3. l’auditeur a des doutes sérieux sur la compétence ou l’intégrité de la direction ou des responsables de la gouvernance.

Compte tenu de la diversité des situations qui peuvent se produire, il n’est pas possible de décrire tous les cas où la démission de l’auditeur est appropriée. Cette décision dépend de facteurs tels que les incidences de l’implication d’un membre de la direction ou des responsables de la gouvernance dans la fraude (et les répercussions possibles sur la fiabilité des déclarations de la direction) ainsi que les conséquences, pour l’auditeur, du maintien de sa relation avec l’entité. (NCA 240.A56)

Dans de telles circonstances, l’auditeur a des obligations professionnelles et légales, qui peuvent différer d’un pays à l’autre. Par exemple, dans certains pays, l’auditeur peut avoir le droit ou l’obligation d’adresser une déclaration ou un rapport à la ou aux personnes qui lui ont confié la mission, ou dans certains cas, aux autorités de réglementation. Étant donné la nature exceptionnelle des circonstances et la nécessité de tenir compte de ses obligations légales, l’auditeur peut juger utile d’obtenir un avis juridique avant de décider de sa démission et de déterminer une ligne de conduite appropriée, qui pourrait éventuellement comprendre la communication d’un rapport aux actionnaires, aux autorités de réglementation ou à d’autres tiers. (NCA 240.CA57)

Directives du BVG

Voir la section BVG Audit 3011 pour obtenir des directives sur l’arrêt d’une mission.

Déclarations de la direction

Exigences des NCA

L’auditeur doit obtenir des déclarations écrites de la direction et, le cas échéant, des personnes responsables de la gouvernance confirmant : (NCA 240.40)

a) qu’elles reconnaissent être responsables de la conception, de la mise en place et du maintien du contrôle interne destiné à prévenir et à détecter les fraudes;

b) qu’elles lui ont communiqué les résultats de l’évaluation faite par la direction du risque que les états financiers puissent contenir des anomalies significatives résultant de fraudes;

c) qu’elles lui ont signalé tous les cas de fraudes avérées ou suspectées, dont elles ont eu connaissance, concernant l’entité et impliquant:

i) la direction,

ii) des employés ayant un rôle important dans le contrôle interne,

iii) d’autres personnes dès lors que la fraude pourrait avoir un effet significatif sur les états financiers;

d) qu’elles lui ont signalé toutes les allégations ou tous les soupçons de fraudes ayant une incidence sur les états financiers de l’entité, portés à leur connaissance par des employés, d’anciens employés, des analystes, des autorités de réglementation ou d’autres personnes.

Directives des NCA

La NCA 580 définit des exigences et fournit des indications sur l’obtention de déclarations appropriées de la direction et, le cas échéant, des responsables de la gouvernance dans le cadre de l’audit. Quelle que soit la taille de l’entité, il importe que la direction et, le cas échéant, les responsables de la gouvernance, en plus de reconnaître qu’ils se sont acquittés de leurs responsabilités quant à la préparation des états financiers, reconnaissent qu’ils sont responsables du contrôle interne conçu, mis en place et maintenu pour prévenir et détecter les fraudes. (NCA 240.A59)

En raison de la nature de la fraude et des difficultés que rencontrent les auditeurs pour détecter les anomalies significatives résultant de fraudes dans les états financiers, il est important que l’auditeur obtienne de la direction et, le cas échéant, des responsables de la gouvernance, une déclaration écrite lui confirmant qu’ils l’ont informé : (NCA 240.A60)

a) des résultats de l’évaluation faite par la direction du risque que les états financiers puissent comporter des anomalies significatives résultant de fraudes;

b) de toute fraude avérée, suspectée ou alléguée concernant l’entité dont elles ont connaissance.

Dans certains pays, il est possible que des textes légaux ou réglementaires apportent des restrictions à la communication par l’auditeur de certaines questions à la direction et aux responsables de la gouvernance. Certains textes légaux ou réglementaires peuvent expressément interdire une communication, ou une autre action, qui pourrait compromettre l’enquête d’une autorité compétente sur un acte illégal avéré ou suspecté, y compris alerter l’entité lorsque, par exemple, l’auditeur doit signaler le cas de fraude à une autorité compétente en vertu de la législation sur le blanchiment d’argent. Dans ces circonstances, les questions examinées par l’auditeur peuvent être complexes et l’auditeur peut juger utile d’obtenir un avis juridique (NCA 240.A61).

Directives du BVG

Voir la section BVG Audit 9050 pour obtenir des directives sur les déclarations écrites.

Il serait approprié de penser à demander des déclarations écrites du comité d’audit si une enquête dont il est responsable concerne soit la haute direction ou d’autres personnes dont le rôle est déterminant dans les contrôles internes portant sur l’information financière.

Directives particulières à l’intention des auditeurs législatifs

Directives des NCA

Dans le secteur public, il arrive souvent que l’auditeur n’ait pas la possibilité de démissionner en raison de la nature de son mandat ou de considérations d’intérêt public. (NCA 240.A58)